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Le maire, l'accession sociale et le promoteur (3)

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LE MAIRE,

L’ACCESSION SOCIALE

ET LE PROMOTEUR

 

Troisième partie, fin.


 

Accession sociale


Une relation triangulaire : propriétaire foncier, promoteur et maire.

 

Le montage d’une opération immobilière s’inscrit toujours dans le cadre local qui associe propriétaire foncier, promoteur et maire.

La condition générale de la négociation est qu’il ne peut y avoir aucun perdant. Les trois parties en présence doivent trouver un intérêt au projet qui se monte.

- La rationalité du promoteur est d’aboutir à un projet vendable au prix estimé lors du montage, prix permettant une marge satisfaisante au regard du coût estimé du projet. Quand le taux de pré-commercialisation dépasse un certain seuil, la construction est lancée.

- La rationalité du maire est d’obtenir un maximum d’avantages de l’opération qui se monte, tout en y investissant un minimum de moyens. Ces avantages attendus peuvent être financiers (participation aux équipements,….) ou en nature (intégration paysagère, réalisation d’équipements…). L’intérêt du maire est que le montant de la charge foncière négociée entre promoteur et propriétaire foncier ne crée pas de référence plus élevée qu’antérieurement.

- La rationalité du propriétaire foncier est de maximiser la rente foncière, c'est-à-dire la différence entre le prix de vente du terrain et le prix auquel il l’a acheté ou obtenu. Si le terrain a déjà une « valeur d’usage », il faut de surcroît que le prix de vente soit supérieur ou égal à la valeur d’usage actualisée.

A partir de là, selon les dires des promoteurs, le reste est une affaire de «dialogue singulier», de « cuisine », de « salade », de « négociation tenace ». Les négociations débutent toujours en amont du projet. Elles ne sont évidemment pas trilatérales, mais bilatérales [1] : le promoteur prend contact simultanément avec la municipalité et avec le propriétaire foncier.

Avec ce dernier, il négocie le prix de vente en fonction de la constructibilité attendue du terrain. Le mécanisme du compte à rebours du promoteur fait que le prix de vente du terrain n’est pas une donnée a priori, mais a posteriori du calcul économique. C’est une fois connus les prix de vente et la constructibilité du terrain que le promoteur peut chiffrer la charge foncière acceptable, c'est-à-dire le prix maximum qu’il peut payer pour le terrain associé au projet. Promoteur et propriétaire [2] ont intérêt à une densité la plus forte possible ; la version la moins dense entraînant généralement un prix qui ne satisfait pas le propriétaire [2].  Ainsi, beaucoup de modifications mineures interviennent pour rendre les documents d’urbanismes compatibles (POS-PLU) avec les opérations souhaitées par les élus mais aussi par les promoteurs, qui en font assez fréquemment directement la demande pour permettre certains projets immobiliers. On retiendra d’une façon générale que, dès lors que la nécessité s’en fait sentir, il n’est pas si complexe d’élaborer des stratégies gagnant-gagnant entre promoteurs et collectivités, pour peu que l’on se positionne à un niveau de gouvernance approprié.

Cependant, il est aussi assez courant que le maire traite directement avec le propriétaire foncier et pèse sur la formation du prix en engageant (ou faisant mine d’engager) une procédure de préemption, dans un objectif de maîtrise foncière.


Des discours contradictoires sur le rôle social du promoteur !

Guilhem Dupuy décrit tout au long de ce chapitre, les comportements des promoteurs qui ne sont pas les mêmes selon que l’on a affaire à un groupe national ou à un indépendant local. Les opinions exprimées ne sont pas particulièrement convergentes non plus. Cependant, on peut assez clairement mettre en lumière deux grands types de discours.

D’une part, le discours « syndicaliste » ; son but est de condenser les problèmes qu’il rencontre sur le terrain afin d’en donner une vision qui interpelle de façon suffisamment percutante les autorités. Ce discours est bien rodé sur la question des contraintes locales. Celles-ci, selon lui, ont plusieurs défauts :

- d’une part elles sont illégales quand elles ne sont pas posées dans un cadre contractuel avec contreparties ;

- d’autre part elles sont moralement injustes, puisqu’elles reviennent à faire financer une partie des politiques locales de l’habitat par l’acquéreur final, victime d’une péréquation qui renchérit le prix de la part des logements construits non soumis à des contraintes particulières. Il ressort de tout cela que le rôle social du promoteur, est neutre. Le promoteur doit construire des logements et les vendre à ses conditions, qui sont les conditions du marché.

D’autre part, le discours « loyaliste » qui correspond au point de vue (affiché) de nombreux promoteurs, nationaux comme locaux. C’est un discours qui a de vraies conséquences pratiques. Il est défendu par certains groupes sur la scène médiatique, comme Nexity par exemple, qui travaille beaucoup à son image de promoteur social, destiné notamment à jouer un rôle dans l’amélioration de la mixité sociale. Mais on retrouve souvent ce discours au niveau local. Crise aidant, les promoteurs défendent souvent les politiques locales de modération des prix, qui rapprochent le marché du bloc de demande et permettent de maintenir un dynamisme des ventes dans un contexte peu favorable.

On voit ainsi comment fonctionnent les deux argumentaires principaux des promoteurs. Ces discours ne nous renseignent pas outre mesure sur la réalité des pratiques, mais ont invité l’auteur de l’étude à investiguer plus avant. Par exemple :


La réalité des stratégies d’imputation des promoteurs

Cette approche devra répondre de façon concrète à la question : sur qui porte effectivement le coût des politiques publiques de l’habitat ?

En ce qui concerne le montage d’opérations immobilières et les ordres de grandeur des postes de dépenses, l’article de référence de ce paragraphe est l’excellente synthèse d’Arnaud Bouteille. Elle est représentative des descriptions obtenues des promoteurs rencontrés par ailleurs par l’auteur. Les étapes du montage d’une opération sont les suivantes :

- prospection foncière et réalisation d’études ; acquisition d’un terrain sous conditions suspensives dans le cadre du jeu triangulaire : propriétaire foncier, promoteur, maire,

- dépôt du permis de construire,

- purge du permis de construire  [3],

- pré-commercialisation : Vente en l’Etat Futur d’Achèvement (VEFA),

-lancement de la construction lorsque le taux de réservation dépasse un certain seuil (usuellement de 40 à 60%),

- vente effective et livraison des logements.

Les ordres de grandeur des postes de dépenses dans le bilan du promoteur s’établissent comme suit :

- marge brute : 30 % du chiffre d’affaires, dans laquelle sont compris les frais financiers, les coûts de commercialisation, les coûts de structure (salaires, études…), et la marge nette (environ 10% avec variance élevée),

- coûts de construction : 40 à 50 % en moyenne du chiffre d’affaires,

charge foncière : fonction du « compte à rebours », donc résiduelle. En moyenne 30% du chiffre d’affaires, avec variance élevée.

 

La connaissance de ces ordres de grandeurs permet de se faire une première idée des principaux leviers dont dispose le promoteur pour faire varier ses coûts. Tout le problème consiste à déterminer quels sont les postes qui peuvent varier, dans quelles proportions, et pourquoi.


Une application de la théorie de l’incidence fiscale 

Pour comprendre la façon dont les promoteurs peuvent imputer le surcoût lié aux pratiques locales d’encadrement des programmes privés, Guilhem Dupuy s’inspire de la théorie de l’incidence fiscale.

Cette théorie est fondée sur l’hypothèse d’un fonctionnement pur des marchés. Or, en matière d’immobilier, les marchés sont rarement purs, voire ne sont simplement pas des marchés.

Le Chercheur considère schématiquement qu’une contrainte formulée par une collectivité locale sur un programme privé (places de parking, quota de logements sociaux ou de logements à prix maîtrisés, grands logements…) représente un surcoût (d’où l’analogie avec des taxes). Surcoût soit directement, comme la construction de places de parking supplémentaires, soit indirectement s’il s’agit d’un manque à gagner par rapport à un prix de vente espéré. On peut donc assimiler ces contraintes à des taxes.

Quand on examine le bilan, et qu’on compile les dires des promoteurs, Guilhem Dupuy s’aperçoit qu’il existe un nombre limitatif de postes susceptibles de varier. Ces postes sont au nombre de trois :

    - la marge nette,

    - la charge foncière,

    - le chiffre d’affaires global, c’est-à-dire les prix de sortie,

Voyons comment le bilan promoteur s’équilibre en présence de surcoûts liés aux contraintes publiques, mais en l’absence de  contreparties directes que sont les subventions publiques.

La réalité sur la question n’a rien de simple.

Un fait général est qu’en pratique, les promoteurs ne supportent jamais réellement le surcoût lié aux politiques locales d’encadrement des activités privées. Même le discours le plus dur contre ces pratiques explique que les quotas de logements sur programmes privés déclenchent un mécanisme de péréquation entre part de logement social et part de logement libre qui revient simplement à subventionner le manque à gagner du logement social par une augmentation du prix du logement libre. C’est donc sur l’acheteur final non aidé que pèse le coût des politiques locales du logement. Le promoteur n’est alors qu’une courroie de transmission, un fantôme de l’incidence.

Suit un long développement dont il convient de distinguer deux cas, selon que la règle locale imposée est négociée ou affichée. Nous laissons au lecteur intéressé le soin d’appréhender cet aspect des choses en lisant le rapport.

                     

   la question de la charge foncière


Une approche intéressante a été développée par Thierry Vilmin pour le cas des aménageurs. Dans le modèle des règles négociées, le propriétaire foncier est en position de faiblesse, puisqu’il est sous le coup d’une importante déficience d’information concernant la constructibilité de son terrain, qui n’est pas connue à priori. L’effet général sera donc une position de force des aménageurs pour négocier à leur prix la charge foncière. Donc en théorie, si on applique au promoteur-aménageur ordinaire, le surcoût éventuel suscité par une politique locale de quotas ; ce surcoût sera compensé par un report sur la charge foncière (comprenons, une diminution du prix d’achat du terrain). Cette charge foncière étant la valeur résiduelle du bilan du promoteur qui est déterminée par soustraction, une fois que les autres postes de dépenses et de recettes sont déterminés.

 

Qu’en est-il en pratique. Curieusement, les promoteurs ne voient pas les choses de cette façon, puisque certains affirment l’impossibilité du report de ce surcoût sur la charge foncière. Ils sont toutefois loin d’être unanimes sur la question. Si le promoteur tient d’une façon générale un discours du type « syndicaliste », il prétendra vraisemblablement que le report sur la charge foncière est impossible. S’il tient un discours du type  « loyaliste », il prétendra que le report sur la charge foncière peut s’effectuer de façon significative. Aussi, on est nettement plus enclin à croire les seconds que les premiers, d’autant que les seconds représentent une très nette majorité de l’échantillon des promoteurs rencontrés.

En revanche, ce qui est vrai dans tous les cas, est l’extrême complexité du fonctionnement du marché foncier. Tous les promoteurs s’accordent sur ce point. Le marché foncier ne naît pas de la rencontre de l’offre et de la demande. L’attitude spontanée du propriétaire est de ne pas vendre. C’est ce qu’on appelle la rétention foncière, liée à l’effet de cliquet qui domine les comportements. C'est-à-dire que lorsqu’un prix est fixé en phase d’approche, il fait figure de référence (par exemple : prix auquel  le voisin a vendu il y a 3 ans,  prix d’un promoteur national menant une stratégie agressive d’insertion sur la ville), il sera alors très difficile de renégocier un prix à la baisse.

Lorsque le propriétaire a le temps pour lui, en dehors des cas de vente forcée, pour cause d’événement de la vie, où le propriétaire doit vendre rapidement, donc aux conditions posées par les promoteurs, la vente peut se faire, dans une certaine mesure, sur la base d’une charge foncière tenant compte des contraintes de constructibilité pesant sur le terrain.

Guilhem Dupuy rappelle que le propriétaire foncier est en quelque sorte la victime idéale de ces nouvelles pratiques de concertation entre collectivités et promoteurs. Les deux groupes d’acteurs s’accordent en effet sur un point crucial : la rente foncière selon eux, est parfaitement injustifié. On entend souvent dans la bouche des promoteurs comme des collectivités l’expression  « enrichissement sans cause ». Du point de vue de la collectivité, le propriétaire foncier n’est rien d’autre qu’un oisif qui récupère de façon indue l’argent du contribuable. Sans rien faire, il encaisse en effet la plus value foncière qui résulte de l’augmentation des équipements collectifs, l’amélioration du cadre de vie, autour de son terrain : cette plus value foncière est financée par la collectivité et tombe dans l’escarcelle des propriétaires fonciers. D’une façon plus générale, d’un point de vue économique, le propriétaire foncier « hérite » directement de la conjoncture immobilière sans qu’il n’en soit aucunement responsable. L’intérêt des promoteurs comme des collectivités converge donc sur ce point : il faut faire reposer le coût des politiques locales de l’habitat sur une captation de cette rente foncière.

Cette étude suggère que la meilleure coalition des rapports de force est celle qui reporte le financement des politiques d’encadrement de la création privée de logement sur le propriétaire foncier, dont la rente est celle qui se justifie le moins  pour les raisons que nous avons vues. La captation de la plus value foncière [4] est une vieille question d’économie foncière, elle demeure cependant d’une actualité brûlante.

En conclusion, même si ici l’étude de l’ANIL est  volontairement simplifiée dans sa présentation en trois parties, elle dégage suffisamment de lignes directrices pour savoir au détriment de qui s’établissent les rapports de force, entre les différents opérateurs locaux.

Pour une analyse plus poussée, compte tenu de la difficulté du sujet abordé, nous recommandons la lecture intégrale du rapport de Guilhem Dupuy, en cliquant sur Etude ANIL : Le maire, l’accession sociale et le promoteur.

 

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Commentaires ADIHBH-V :

[1] En vertu du vieux principe : diviser pour régner !

[2] Dans l’exemple de l’aménagement d’une ZAC, le propriétaire peut aussi être la Municipalité qui a acquis du foncier par préemption, et qui va le revendre au promoteur,

[2] Le permis de construire n’a économiquement de sens que s’il est « purgé », c'est-à-dire débarrassé des recours de tiers qui ne manquent pas de survenir lors de son dépôt en Mairie,

[4] On pourrait raisonnablement ce poser la question de savoir, s’il ne s’agit pas ici tout simplement, d’une spoliation des propriétaires fonciers !


Contribution bibliographique :

Arnaud BOUTEILLE, Opérateur privés du logement neuf, Etudes Foncières n° 140, juillet-août 2009,

Thierry VILMIN, L’aménagement urbain en France, Edition du Certu, 2008.

  

 

Le maire, l'accession sociale et le promoteur (2)

Publié le

LE MAIRE,

L’ACCESSION SOCIALE

ET LE PROMOTEUR

 

Deuxième partie


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La pratique des politiques locales du logement : une adaptation des moyens aux objectifs politiques 

Au niveau réglementaire, les communes peuvent inscrire de nombreuses dispositions d’organisation du droit des sols au PLU. Leurs aides aux primo accédants permettent également de disposer d’un droit de contrôle étendu sur les programmes privés mobilisés pour l’accession aidée. Le Programme Local de l’Habitat (PLH) permet de tracer les lignes d’une véritable politique de l’habitat avec objectifs chiffrés par types de logement.

On doit cependant mettre en perspective ces outils légaux par rapport aux objectifs qu’ils sont supposés servir. Il n’y a pas autant d’objectifs politiques qu’il y a de situations locales. L’auteur signale que ses nombreuses discussions avec toutes les parties impliquées dans la question locale du logement, l’étude de nombreuses sources primaires et secondaires, montrent qu’en matière d’encadrement règlementaire des opérations de logements, les objectifs des élus varient peu d’une collectivité à une autre et se rangent facilement dans un nombre limitatif de cas. On dénombre six grandes catégories, mais nous ne détaillerons ici sommairement qu’un seul cas, à savoir :

Les objectifs de maîtrise foncière

Dans certains cas, la collectivité peut vouloir intervenir en amont pour peser sur la négociation des charges foncières entre propriétaire foncier et acquéreur. Elle reste l’apanage des collectivités manifestant une volonté et une capacité de maîtriser l’immobilier d’un bout à l’autre de la chaîne économique. Elle n’est pas une politique occasionnant des surcoûts sur les programmes privés, puisqu’il s’agit au contraire d’une politique de maîtrise foncière qui bénéficie sur le papier à tous les acteurs du logement, à l’exception des propriétaires fonciers. Elle reste toutefois une illustration intéressante entre règle de droit et règle de fait. Les élus ne se cachent pas d’exercer leur droit de préemption urbain souvent en dehors du cadre strictement légal, dans un motif de régulation des prix du foncier, qui n’est pas un motif valable selon la jurisprudence (le droit de préemption ne peut s’exercer qu’au service d’un projet existant et en lien direct avec celui-ci). On trouvera une description très intéressante de ces pratiques dans un article d’Olivier Morlet (1997), à compléter par celui de Godfrin (1995).

Les municipalités cherchent à contourner l’exigence légale de motiver le droit de préemption en fournissant des motifs vagues, du reste assez fréquemment cassés par les juridictions administratives. La raison véritable de la préemption n’est pas toujours liée à un projet existant. Le but non avoué : exercer un droit de regard sur les valeurs foncières de référence susceptibles d’évoluer au gré des ventes de terrains. Cette pratique agit comme une épée de Damoclès sur toutes les transactions et pousse fortement à la concertation en amont. Morlet explique ainsi : « la prise de contact informelle avec les élus locaux ou les services techniques devient ainsi un passage obligé, aussi bien pour le vendeur que l’acquéreur qui doit exposer à la commune son projet ». Cité par Morlet, un chargé d’opérations d’une SA de HLM confirme : « On ne monte jamais une opération sans avertir préalablement les élus et leur présenter le projet envisagé. On ne signe aucune promesse de vente qui risquerait de violer les règles non écrites de la collectivité et on n’engage aucune dépense avant d’avoir eu l’accord de la municipalité sur le projet envisagé, pour ne pas risquer une préemption. »

La légitimité démocratique

Un élu interrogé sur les problèmes de droit posés par l’articulation Plan Local d’Urbanisme (PLU) / Plan Local de l’Habitat (PLH) dans l’instruction des permis de construire s’exprimait en ces termes : « ………………,Il serait dommage de se limiter au strict réglementaire quand on a une politique du logement cohérente, élaborée en amont avec les professionnels ». A partir de là tout est dit. Le positionnement non pas en dehors, mais au-delà du droit, les élus l’assument tous sans hésitation. « C’est illégal, et alors ? » s’amuse un autre élu. L’illégalité ne semble pas avoir cours en politique, du moins sur ce genre de sujet. Il est très éloquent de voir le chantage au permis de construire, cette pratique décriée des promoteurs, censément occulte, qui a motivé cette étude, explicitement citée comme un moyen ordinaire parmi d’autres d’encadrer le logement.

On l’aura compris, la légalité des pratiques d’encadrement des programmes de logement compte moins que leur efficacité pratique, du point du vue des élus. Non pas que les élus fassent fi de la légalité puisqu’ils s’appuient toujours, on commence à le voir, sur des dispositifs réglementaires qu’ils  « complètent » à leur façon, mais ils se sentent investis d’une mission d’intérêt général qui est de défendre les besoins de leurs administrés, ultime Cour de justice devant lesquels ils se sentent bien davantage responsables que devant le Préfet ou le Tribunal administratif.

Guihem Dupuy se garde bien toutefois de généraliser abusivement. Cette attitude dit-il, est plutôt l’apanage des communes suffisamment bien dotées en ingénierie technique, seules capables de ne pas craindre outre mesure le contrôle de légalité de la Préfecture. Les promoteurs également parlent beaucoup de cette légitimité, plat qui leur est régulièrement servi et qui les laisse perplexes car, pas toujours très inspirées, voire contreproductives.

Le cas d’école des logements à prix maîtrisés : un examen approfondi

Illégale en l’état mais très généralement pratiquée, techniquement complexe, imposée parfois de façon arbitraire, au service de politiques parfois clientélistes, notamment quand les logements à prix maîtrisés sont produits en petite quantité et  donc rares. La loi du 28 Mars 2009 précise que les PLU peuvent désormais « délimiter, dans les zones urbaines ou à urbaniser, des secteurs dans lesquels, en cas de réalisation d'un programme de logements, un pourcentage de ce programme doit être affecté à des catégories de logements qu'il définit dans le respect des objectifs de mixité sociale » Les juristes considèrent que cette disposition donne une base légale définitive aux quotas de logements locatifs sociaux, mais qu’elle donne également une base légale aux quotas de prix maîtrisés en accession. La contrainte de prix maîtrisés semble donc avoir suivi le même chemin que la contrainte de logement locatif social, même si cette nouvelle étape passe inaperçue pour l’instant, les pratiques observées s’étant toutes construites sur des bases semi-illégales antérieures à 2009. La différence entre ces deux contraintes reste significative, pour plusieurs raisons.

Dans les faits, la contrainte de prix maîtrisés peut être écrite ou non écrite. Le cas général est la contrainte non écrite et néanmoins connue de tous. Cependant de nombreux documents en portent la trace explicite. Des délibérations de conseils municipaux, peuvent par exemple stipuler ce genre de contraintes. Dans ces documents, on ne les trouve pas de façon isolée mais toujours adossées à des dispositifs légaux, règlementaires et/ou opérationnels, comme le Pass-Foncier, le PSLA, les zones ANRU, éventuellement des ZAC, des mises à disposition de terrain communal, ou encore une politique de compensation de la surcharge foncière. Cet ensemble de dispositions suffit généralement à étayer une politique de quotas de prix maîtrisés sur tous les programmes.

Ensuite, on peut trouver ce genre de contraintes dans des documents particuliers, que l’on qualifiera de « chartes de l’habitat », du nom qu’on leur donne en Seine-Saint-Denis. Ces chartes n’ont pas de valeur juridique et n’ont pas une existence sociale très manifeste. Ce sont les promoteurs qui  en ont révélé l’existence à l’auteur de l’étude. Sans que cela soit certain, leur existence est probablement limitée à l’Ile de France. Elles sont caractéristiques de l’ancienne banlieue rouge et de la conception volontariste du pouvoir qu’on y trouve encore chez les élus. C’est un territoire qui est assis sur un foncier à très fort potentiel, puisque très proche de Paris mais disposant de réserves foncières importantes (dents creuses, friches industrielles). Ces terrains, pour beaucoup encore hors marché dans les années 1990, ont été propulsés sur le marché par l’explosion des valeurs foncières. La période haussière a vu les promoteurs se bousculer au portillon, les perspectives de forte plus value immobilière étant au coin de la rue et aux portes de Paris. Les élus, un peu décontenancés, ont profité de cette forte attractivité de leur territoire pour imposer leurs conditions sans que personne n’y trouve à redire. Ces chartes sont imposées unilatéralement par la municipalité à tout promoteur désireux de travailler sur le territoire communal.

Comment se présente une convention de ce type ? Guilhem Dupuy prend l’exemple de la convention de Saint-Ouen. Il s’agit d’un document de trois pages, ratifié par le promoteur, à qui la mairie n’adresse pas d’exemplaire contresigné, à la différence d’une convention de droit commun, pour ne pas laisser de trace, en quelque sorte. Cette convention est passée lors de la préparation d’un projet immobilier, dans le cadre d’une prise de contact préalable. Dans ce document, on trouve beaucoup de déclarations de principe sur l’insertion dans l’environnement urbain, etc., ainsi que quelques détails intéressants : « ce projet devra comporter au moins 65% de F3, F4, F5 » ou encore « la société signataire de la présente convention s’engage à fournir à la ville, la réalité des prix de vente de chacun des logements et les éléments d’information d’ordre sociologique concernant les acquéreurs », exemples des objectifs politiques cités plus haut. Mais surtout :

« la société signataire de la présente convention se conformera au dispositif d’encadrement mis au point avec la ville : sur la base d’une connaissance fine des prix du marché par quartier, obtenue notamment par le croisement des études effectuées d’une part par les promoteurs et d’autre part, par les services de la ville concernée, les prix de sortie des opérations en accession à la propriété seront diminués de 10 %. Dans cette opération, le prix de sortie prévisionnel était fixé à 3 500 TTC/ m². »

Ces chartes n’ont pas de valeur juridique, mais une valeur monopolistique, elles sont une parfaite illustration du processus de pression-négociation au permis de construire. Elles sont une réponse directe au diagnostic fait par les élus de la nécessité d’endiguer les prix de l’immobilier dans un marché devenu instable au début des années 2000. Les promoteurs rencontrés en Ile de France semblent beaucoup plus circonspects que leurs collègues provinciaux quant à l’efficacité d’une politique d’accession aidée. Dans un marché tendu comme celui de l’Ile de France, une politique qui consiste essentiellement à contrôler une faible partie du marché pour y faire baisser les prix n’a, contrairement à ce que pensent les maires, aucun effet sur les déterminants réels des prix immobiliers. C’est également l’avis qu’exprime un économiste du foncier : « Les maires ont de toute façon un raisonnement très naïf sur les prix maitrisés : ils s’imaginent que proposer des logements aux prix en dessous du marché permet de faire baisser les prix. C’est faux. Ca ne modifie en rien la valeur des biens. Ça fera quelques heureux, tout au plus. ». Les exemples ne manquent pas qui confortent ce discours.

L’exemple de Saint-Germain-en-Laye est cité. Selon un promoteur, les heureux élus accédants étaient pour l’essentiel de jeunes consultants ayant terminé leurs études un ou deux ans auparavant…..Mais il y a pire, beaucoup de promoteurs rapportent que, notamment en Seine-Saint-Denis : « un promoteur a obtenu un terrain communal en échange d’un programme à prix maîtrisés. Résultat, tous les cadres de la boîte y ont acheté et en ont fait du locatif. Inutile d’y inclure une clause anti-spéculative qui contrôle la revente puisque rien n’a été revendu ! ». Ou encore « On s’est retrouvé par exemple avec des immeubles où 9 acquéreurs sur 10 étaient des cadres de l’entreprise de promotion. Les exemples seraient fréquents. »

Le fait marquant est le décalage constaté entre les résultats souhaités et les résultats objectifs d’une politique de cet ordre. Ce qui, est presque toujours vrai, est le fait que les logements à prix maîtrisés sont rares et ne profitent donc qu’aux « initiés », ceux qui auront obtenu à temps l’information. Quand ce ne sont pas les cadres qui ont monté l’opération immobilière. Le maire prenant soin que lesdits initiés, soient des administrés méritants. Cette pratique, dite de  « préférence communale », est évidemment strictement illégale, mais dans ce modèle stratégique où la variable cruciale est le temps, un simple jeu sur les délais permet de distribuer l’information de façon sélective et de faire jouer la préférence communale sans s’exposer à une assignation pour refus de vente, puisqu’il n’y plus rien à vendre. Les moyens de cette rétention sont simples : l’information sur les projets en cours sur le point d’être pré-commercialisés se limite à la parution d’annonces pendant 15 jours dans le bulletin municipal, dont la lecture n’excède guère le territoire communal. Au final, quand le projet est mis officiellement en vente, une part majoritaire des logements est déjà réservée, essentiellement par des habitants de la commune. Les promoteurs, quant à eux, y voient un moyen efficace de régler le problème parfois épineux de la commercialisation.

L’étude de ANIL HABITAT ACTUALITE se poursuit sous l’angle des modèles locaux de négociation qui associent : propriétaire foncier, promoteur et maire. Nous aborderons cet aspect des choses dans une troisième partie.

 

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Contribution bibliographique :

Guilhem Dupuy, « Le maire, l’accession sociale et le promoteur »,  ANIL HABITAT ACTUALITE, Février 2010.

Olivier MORLET, « Les pratiques locales de la préemption », Etudes Foncières n°86, mars 1997,

Gilles GODFRIN, « Préempter, pour acquérir ou pour contrôler ? » Etudes Foncières n° 68, septembre 1995.

 


Le maire, l'accession sociale et le promoteur (1)

Publié le

 

LE MAIRE,

L’ACCESSION SOCIALE

ET LE PROMOTEUR

 

Première partie

 

 

Accession sociale


 

Préambule


Les collectivités locales sont de plus en plus impliquées dans la politique du logement. Alors que l’essentiel de leur effort était autrefois tourné vers le locatif social ou des interventions de nature très sociales ciblées sur des populations spécifiques. Elles élargissent aujourd’hui leur champ d’intervention à l’ensemble du secteur du logement et notamment à l’accession à la propriété.

Les outils dont elles disposent peuvent être, entres autres, les règles d’urbanisme et tous les moyens qui permettent de peser sur l’usage du sol et le droit de construire. Comment les collectivités locales procèdent-elles concrètement, notamment dans leurs relations avec les promoteurs, pour jouer de ce  registre ?

Pour y voir plus clair, l’Agence Nationale pour l’Information sur le Logement (ANIL) a proposé à un jeune chercheur, Guilhem Dupuy, d’étudier en toute indépendance cette question. Nombre de partenaires de l’ANIL lui ont apporté leur appui.

Cette étude décrit les objectifs des politiques locales d’encadrement de l’activité privée de création de logements, et analyse les moyens mobilisés pour servir ces objectifs. Elle montre que ces objectifs sont en nombre réduit et participent généralement d’une politique de stabilisation de l’électorat sur le territoire de la commune : logement locatif social et accession sociale sont ainsi prioritairement pensés dans cette optique par les collectivités.

Ce travail nous a paru extrêmement intéressant pour que nous puissions le porter partiellement à la connaissance des lecteurs du blog de l’ADIHBH-V, compte tenu de ce que nous constatons par ailleurs.

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Le cadre réglementaire des politiques locales du logement ne peut être compris qu’en analysant les pratiques hors droit des collectivités. Pratiques légales et illégales sont, en général, inextricables.  Cet ensemble permet de mener une politique plus discrétionnaire que ne le permettrait le droit, dans un univers d’information limitée où l’appréciation au cas par cas s’avère parfois nécessaire.

C’est ainsi que, notamment en conséquence de la phase de hausse des prix immobiliers de 1997-2007, au cours de la décennie des années 2000, se sont développées de nouvelles pratiques d’encadrement de la création privée de logements ; de même que les modèles de concertation et de négociation entre élus et professionnels du logement, notamment les promoteurs, ont évolué.

Dans le même temps, les outils réglementaires à la disposition des maires se sont étoffés. Depuis 2007, l’octroi d’une aide par une collectivité déclenche la majoration du Prêt à Taux Zéro (PTZ) et le Pass-Foncier®, ce qui lui confère un puissant effet de levier. Le Pass-Foncier® lui-même a pris une certaine importance conjoncturelle en 2009 avec le remboursement par l’Etat d’une partie de l’aide accordée par les collectivités.

Subsiste cependant un problème. La compétence générale d’une commune sur le plan de l’urbanisme et du logement reste un pouvoir d’administration de l’usage des sols. D’aucuns disent : un pouvoir de dire non. Pouvoir d’ailleurs absolu, puisque c’est la commune qui dans tous les cas délivre les permis de construire sur son territoire. Cette différence entre droit et pratique,  n’est que rarement abordé dans la littérature. Pourtant, dans les faits, la différence entre urbanisme réglementaire et urbanisme opérationnel est ténue. A l’instar de la démarche contractuelle, la démarche réglementaire, en particulier à l’échelle locale, s’insère toujours dans un réseau d’acteurs publics et privés, c’est-à-dire un certain état des relations de pouvoir, au sein duquel elle est élaborée. Autrement dit, on ne peut rendre compte de l’activité d’urbanisme réglementaire d’une commune qu’en analysant les pratiques de concertation et de négociation qui se pratiquent au sein de ce réseau.

La nécessité de cette analyse pratique s’impose d’autant plus que le discours d’une partie des promoteurs a commencé ces dernières années à faire état d’une abondance de pratiques locales d’urbanisme peu soucieuses de légalité, comme le  « chantage au permis de construire », rendant difficile, voire impossible, l’exercice normal de la profession. En quelque sorte, d’après ce discours, l’instruction du permis de construire ne se réfèrerait au PLU que selon le bon vouloir des autorités, alors qu’en droit cette instruction consiste simplement à vérifier la compatibilité du permis de construire au PLU. La délivrance du permis de construire est en droit une compétence liée de la commune, elle ne peut faire l’objet d’une décision d’opportunité, d’un choix stratégique.

En pratique pourtant, il semble qu’il en aille tout autrement. D’une façon générale, toujours selon ce même discours, la prise en main de la politique de l’habitat par les communes se traduirait par un transfert du coût de cette politique sur les agents privés, en particulier les acheteurs : moins coûteuse pour la commune qu’une politique active de coproduction et cofinancement de logements, une politique passive de l’habitat consiste à imposer à travers des règles, légales ou illégales, des conditions sur les programmes privés de logement afin de satisfaire certains objectifs (formes urbaines, mixité sociale, accessions à prix maîtrisés…). Le coût de cette politique est ainsi transféré sur le bilan des promoteurs, eux-mêmes contraints d’en transférer la plus grande partie sur leurs prix de vente. Ces politiques peuvent avoir des effets indésirables, comme une tendance à la hausse des prix, lorsqu’elles ne se développent pas dans un cadre de concertation approprié. D’une façon générale, elles sont vouées à l’échec si elles génèrent des opérations où le gain net n’est pas positif pour au moins une des parties engagées dans l’opération (promoteur, collectivité, propriétaire foncier).  Ajoutons à cela l’insécurité juridique et économique résultant d’une règle fluctuante et imprévisible, puisque non écrite, et les perspectives deviennent particulièrement sombres.

Ces constats appellent à une série de questions :

- Comment caractériser les politiques réglementaires du logement des collectivités locales ?

- L’administration de l’activité privée de construction sur le territoire de la commune dépasse-t-elle effectivement le cadre du droit de l’urbanisme ? Dans quelle mesure ? Sur quels points ? Pour quelles raisons et pour quels objectifs ?

- Quel est l’impact de cette politique sur les activités de construction ? En premier lieu, comment la concertation entre autorités publiques et professionnels du logement est-elle organisée ? Sur quels compromis débouche-t-elle ?

- Ensuite, quels sont les effets économiques de cette politique ? Sur qui et comment est-elle répercutée ? Comment réagissent les promoteurs ? Dans quelle mesure modèle-t-elle le marché de l’immobilier ?

Selon Guilhem Dupuy, cette étude se limite à la dimension qualitative. La difficulté du sujet abordé et le manque de littérature sur la question plaidaient pour une première approche exploratoire dont le but est davantage de décrypter les véritables enjeux de la question que de fournir des analyses poussées au plan quantitatif et économique.

Dans une deuxième partie, nous exposerons  quelques sujets singuliers d’actualités (objectifs de maîtrise foncière, les modèles locaux de négociation, la relation triangulaire propriétaire foncier-promoteur-maire, l’ordre de grandeur des postes de dépenses dans le montage d’une opération (marge brute, marge nette des promoteurs), les discours contradictoires sur le rôle social des promoteurs,…), laissant au lecteur la découverte  de l’intégralité  de la richesse de cette étude.

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Contribution bibliographique : ANIL HABITAT ACTUALITE, Février 2010. Le maire, l’accession sociale et le promoteur. La négociation entre élus locaux et promoteurs : une analyse stratégique. Guilhem Dupuy.

 

 

 

Enquête Publique : Plan de Prévention d'Inondation de la Marne

Publié le

 


 

PLAN DE PREVENTION

DU RISQUE

D’INNONDATION

DE LA MARNE (PPRI)

ENQUÊTE PUBLIQUE

 

 

 

port marne

 

 

Après la cruelle épreuve traversée par les Vendéens et les Charentais, il y a quelques semaines, voila un sujet d’actualité qui mérite la plus grande attention des habitants de Noisy le Grand.

 


Mémorandum :

 

Lu dans Le Canard enchainé du 31 mars 2010. « Avant la tempête, une inondation de permis de construire ». Députés, Sénateurs, Maires et Promoteurs ont bétonné sans vergogne la côte vendéenne et ses zones inondables. Depuis la catastrophe et les 53 morts, les mêmes dénoncent la violation du principe de précaution….

Aujourd’hui, avec des trémolos dans la voix, ils demandent « l’accélération de la mise en place des Plans de Préventions des Risques d’Inondation ».Alors que pour ces deux communes, le PPRI qui aurait pu bloquer la folle urbanisation n’est toujours pas entériné. En effet, depuis 2001, ces municipalités, à la faveur de longues procédures juridiques, courriers dilatoires, et réunions de conciliation, retardaient son adoption.

En Experts patentés des zones inondables, ces élus qui avaient la « légitimité électorale » annonçaient que La Faute-sur-Mer et L’Aiguillon se trouvaient parfaitement protégés de toute menace de subversion maritime.

 

 

Enquête Publique

 

Le projet de Plan de Prévention du Risque d’Inondation de la Seine dans le département de la Seine-Saint-Denis concerne les cinq communes suivantes : Gagny, Gournay-sur-Marne, Neuilly-Plaisance, Neuilly-sur Marne et Noisy-le-Grand.

Le dossier d’Enquête Publique est consultable du 27 avril au 1er juin 2010 inclus, soit une durée de 36 jours, à la Direction de l’Urbanisme, Hôtel de Ville, 16 bd du Mont d’Est, à Noisy le Grand, aux jours et heures ouvrables au public.

Le Commissaire Enquêteur est Monsieur Jean CULDAUT, Architecte-Urbaniste, Directeur Technique.

Une Réunion Publique sera organisée le vendredi 7 mai 2010 à partir de 17h30 à la Mairie de Gournay-sur-Marne, salle Alain Vanzo, rue de l’Alouette.

 

Le dossier du projet de PPRI de la Marne dans le département de la Seine Saint Denis  est composé de documents textes et cartographiques, téléchargeables en cliquant sur PPRI Marne.

Par ailleurs, le Préfet de Seine Saint Denis avait transmis le projet de PPRI à la commune de Noisy-le-Grand, par courrier en décembre 2008, pour avis. Trois zonages, sur les quatre possibles ont été retenus à Noisy-le-Grand. Seuls les zonages « jaune », « orange » et « rouge » sont applicables.

Précédemment, un préalable avec la Préfecture et la DDE, avait conduit la Ville de Noisy-le-Grand à faire valoir l’enjeu majeur, à l’échelle supra-communale, que représentait l’aménagement des bords de Marne.

Situé en entrée de ville et en bord de Marne, ce secteur de huit hectares actuellement en friches représenterait un fort potentiel d’aménagement pour la commune de Noisy-le-Grand. Cette dernière souhaitant développer les activités touristiques et de loisirs liées à la Marne en créant entre la Marne et le pied du coteau un parc paysager de loisir sur le thème de l’eau. Les liaisons douces piétonnes et cyclistes seraient privilégiées et, à terme, ces espaces seraient reliés aux 270 ha du bois Saint Martin (NDLR : à voir, c’est pas encore gagné). Trois hectares seraient ouverts à l'urbanisation ; des logements hors d'eau seraient envisagés.

Ainsi, face à ce lobbying, deux projets, dans le secteur de la Rive Charmante et des Epinettes, avaient ainsi été pris en compte.

Par ailleurs, ne se refusant aucun sacrifice, des études hydrauliques [*] réalisées par la ville avaient permis de faire évoluer le zonage du PPRI de ces secteurs, initialement prévus en « zone rouge » dite d’expansion des crues, vers la « zone jaune », dite urbaine, en aléas forts et autres. Ce dernier zonage autorise une urbanisation limitée et raisonnée des secteurs de la Rive Charmante et des Epinettes, alors que la zone rouge précédente, d’une façon générale, interdisait toute nouvelle construction.

Finalement, c’est dans sa séance du 02 février 2009, que le Conseil Municipal a délibéré pour donner un avis favorable sur ce projet de PPRI de la Préfecture, assorti de réserves, dont certaines sont fondées, mais d’autres opportunistes du type : « La commune souhaite également que le projet de PPRI prenne en compte les objectifs du SDRIF . Celui-ci propose en effet de maîtriser et adapter l’urbanisation nouvelle, en particulier l’aménagement urbain renouvelé, en zone inondable. Tout en étant compatibles avec le risque d’inondation, des opérations innovantes de construction pourraient ainsi être développées dans ces zones, à titre de test ».(voir la délibération du CM du 02 février 2009).

 


Commentaire


Ainsi, la Municipalité de Noisy le Grand admettrait très bien que ses bords de Marne deviennent une zone expérimentale de constructions en zones inondables, moyennant vraisemblablement quelques subventions de la Région Ile-de-France. Cela aurait de l’allure, nous pourrions titrer en entrée de Ville : « Noisy le Grand, première Ville de l’Est Parisien les pieds dans l’eau ».

Blague mis à part, nous restons dubitatifs face à ces études hydrauliques réalisées par la Ville, « sur commande », qui auraient tout simplement pour but d’instrumentaliser les futures options urbanistiques de la Commune. Nous pouvons raisonnablement nous poser plusieurs questions : Quel est le cabinet d’étude ? S’agit-il de Setec-Hydratec ? Est-il reconnu par la DDE ? Quel est son degré d’indépendance ? Autant de questions qui restent pour nous sans réponses, mais qui devront être approfondies par le Commissaire Enquêteur. Ceci étant, nous connaissons parfaitement la validité des modèles mathématiques qui, finalement, ne sont fonction que de la pertinence des paramètres mathématiques que vous introduisez dans les équations. Et là, les conclusions deviennent aléatoires en fonction des objectifs !

En outre, que peut-on dire de la construction des maisons hors d’eau ? S’agit-il de maisons sur pilotis comme nous en trouvons dans le Languedoc-Roussillon ? Dans ce cas là, nous avons déjà un bel exemplaire en bord de Marne avec « La Pergola », hypothétique  guinguette ‘mort née’ qui ne trouve pas de Gérant depuis des année.


 

Nos conclusions


Non, le sujet est trop grave, Xyanthia est passé par là voilà quelques semaines, la construction en zone inondable est aujourd’hui pointée du doigt et il faut durcir les règles de construction. C’est la raison pour laquelle nous sommes fermement opposés à la future urbanisation des 3 ha des bords de Marne. Nous disons non, à la modification du zonage proposé par la Ville de Noisy le Grand, et nous sollicitons le maintien dans ce projet de PPRI des zones inconstructibles rouges et oranges, qui sont des zones en aléas très forts (supérieurs à 2m). Donc pour nous, tolérance zéro.

En fait, ceci n’aura aucune incidence sur le développement des activités touristiques et de loisirs liées à la Marne en créant un parc paysager de loisir sur le thème de l’eau, et des liaisons douces piétonnes et cyclistes. En d’autres termes, la qualité de vie des Noiséens n’en sera en aucun cas affectée.

Evidemment, pour la promotion immobilière chère à la Ville !!!….., mais c’est un autre débat. A moins que ce ne soit finalement le véritable enjeu ?

Cette opinion est encore confortée par Nicolas-Gérard CAMPHUIS, Directeur du Centre Européen de Prévention du Risque d’Inondation (CEPRI), comme il a pu l’énoncer dans l’émission d’Yves CALVI « C dans l’Air » du jeudi 08 avril courant, à savoir : « obligatoirement, de nouvelles catastrophes naturelles exceptionnelles auront  lieu dans le futur. Mais où ? A quel moment ?.... »

Par contre, nous sommes en parfaite harmonie avec la délibération de la Commune en date du 02 février 2009, lorsqu’elle s’interroge sur l’absence de référence au PPRI adopté ou en cours d’élaboration dans le Val de Marne. Il est évident qu’il doit y avoir une parfaite cohérence des PPRI entre les départements du Val de Marne et de la Seine Saint Denis.

 

 

 

[*] Connaissances apportées par les études hydrauliques

Les études hydrauliques mettent en œuvre des modèles de simulation dynamique des écoulements dans les cours d’eau et les vallées inondables. Ces outils mathématiques permettent de calculer les lignes d’eau et les vitesses pour une configuration géométrique de vallée donnée.

La simulation hydraulique est le plus souvent effectuée à partir d’un modèle par « casiers » qui utilise un découpage en îlots géographiques (appelés « casiers hydrauliques ») pour représenter la zone inondable. Les principaux intérêts du modèle par casiers sont qu’il peut restituer pour chaque zone le niveau d’eau et le débit transitant et qu’il permet d’appréhender la notion de hauteur d’inondation, de durée d’inondation et de direction privilégiée de l’écoulement. De tels modèles sont donc capables de restituer de manière dynamique, au fur et à mesure de la propagation de la crue (donc en régime transitoire), l’évolution de la tache d’inondation au sein du lit majeur de la rivière. Ils permettent aussi de rendre compte de la complexité des phénomènes hydrauliques à l’échelle locale : chenaux préférentiels d’écoulement, zones d’accumulation, ainsi que de la présence des nombreux obstacles implantés dans le lit majeur : routes, voies SNCF, remblaiements, digues,…

Une étude hydraulique a été réalisée en 1997 par HYDRATEC pour le compte du service navigation de la Seine dans le but de décrire les écoulements dans le lit d’expansion de la Marne et de représenter les zones inondées pour différents types de crues (1910, 1955, 1970, 1983, 1993).D’autres études hydrauliques ont été menées pendant la période 1992-1998 à l’échelle de la région Île-de-France. Ces études ont été réalisées par SETEC-HYDRATEC pour le compte des Grands Lacs de Seine (IIBRBS). Il s’agissait dans un premier temps de simuler différentes crues sur les bassins Marne et Seine et de déterminer l’efficacité des protections existantes.

Les études de modélisation hydrauliques permettent d’établir en tout point de la zone inondable les cotes maximum de crue s’établissant par submersion directe ou indirecte. Cependant, leur limite vient de la précision du découpage en casiers, qui n’est parfois pas suffisante pour permettre une interprétation locale pertinente des résultats fournis par les modèles.

Pour cartographier les aléas inondations de manière plus précise, il est nécessaire de limiter le champ de l’étude et d’affiner la détermination des hauteurs d’eaux.